Diplomatie" : Choltitz salvou Paris?
Com "Diplomatie", o realizador alemão Volker Schlöndorff apresenta brilhantemente o momento em que Hitler pretendeu destruir Paris. O filme estreou nas salas de Paris a 5 deste mês. Eis a crítica de François-Guillaume Lorrain em " Le Point"
"Le réalisateur allemand Volker Schlöndorff assume le parti pris : "Tout ou presque, dans Diplomatie", est une fiction." Non, le général von Choltitz, commandant du Gross Paris, n'a pas, contrairement à une légende popularisée par le film de René Clément Paris brûle-t-il ?, sauvé Paris en refusant d'exécuter l'ordre de Hitler de raser la capitale. "Il s'est donné le beau rôle dans ses Mémoires, en 1951, où il avait besoin de laver sa réputation, car il avait contribué à la destruction de Rotterdam et fait raser Sébastopol, assistant - sinon participant - à l'extermination de 50 000 juifs par l'Einsatzgruppe n° 3", poursuit Schlöndorff.
Or, le réalisateur du Tambour a choisi, en adaptant la pièce de Cyril Gely, une autre version, plus efficace dramaturgiquement : dans son film, le général allemand, décidé d'abord à détruire la capitale, se laisse peu à peu persuader par le consul Nordling de n'en rien faire. "Choltitz aurait bien exécuté l'ordre, mais son propre état-major ne lui en donne pas les moyens. On lui refuse la dynamite dont il a besoin et on lui interdit l'accès aux avions du Bourget pour faire bombarder Paris. Par contre, il essaie de faire venir d'Allemagne les très gros canons avec lesquels il a détruit Sébastopol. Et il se renseigne sur les torpilles sous-marines entreposées près de l'École militaire. Mais il ne peut rien en faire. Ensuite, il ne bouge plus. Il est paralysé. C'est un homme hésitant, tiraillé, ce que j'ai essayé de montrer. Sa valeur principale était la famille. L'honneur de sa famille était-il davantage souillé s'il refusait d'exécuter l'ordre de Hitler ou s'il brûlait la ville ?"
Raide, sec et mal dégrossi
Ce tiraillement, Schlöndorff l'a perçu dans le protocole d'interrogatoire de von Choltitz par les Anglais, après son arrestation le 25 août 1944. La première phrase du protocole dit : "Ce général semble tout droit sorti d'un film hollywoodien." Raide. Sec. Mal dégrossi. C'est là qu'il commence à échafauder la théorie du sauvetage. Mais les Anglais notent qu'"il ne peut s'empêcher de [leur] donner des leçons de morale". Ce que Choltitz ignore, c'est que le soir, retrouvant les autres généraux allemands arrêtés, il est sur écoutes. Tous ses collègues lui tombent dessus : comment a-t-il pu capituler sans détruire Paris ? Choltitz se défend : il a toujours exécuté les ordres, même les plus horribles, "avec les dernières conséquences". Puis il interroge le général Ramcke, qui a rasé Brest, sur la technique qu'il a employée. "Il est donc curieux, analyse Schlöndorff. Mais partagé. Il demande si ce n'est pas un crime de guerre."
Dans la réalité, le consul Nordling avait vu Choltitz à cinq reprises depuis le 7 août 1944. Comme on peut le lire dans ses Mémoires (Payot-Rivages), édités par l'historien Fabrice Virgili, le consul a négocié bien des points avec Choltitz : "Une trêve entre la Résistance et les Allemands. La libération des prisonniers politiques - promis sinon dans ces derniers jours à une déportation sans retour - et la distribution de nourriture aux Parisiens", énumère l'historien. Par contre, Nordling n'évoque pas l'ordre qu'aurait reçu Choltitz de détruire Paris ni de conversation sur ce sujet. S'il avait tenté d'infléchir Choltitz après le 20 août, il en aurait fait état. Du reste, le 23 août, Nordling, soumis à de multiples pressions dans une capitale en ébullition, est hors service, victime d'une crise cardiaque. Dans son ouvrage sur la Libération de Paris (Tallandier), Jean-François Muracciole va même plus loin : il ne s'agissait pas de raser Paris comme Varsovie, la capitale n'ayant aucun intérêt stratégique pour les belligérants, le front de l'Ouest - une guerre classique - n'étant pas le front de l'Est, une guerre d'anéantissement.
Schlöndorff livre une dernière anecdote confirmant selon lui que Choltitz s'est vanté : "Comme nous avons tourné au Meurice, QG de Choltitz, j'ai pu discuter avec le vieux barman qui l'avait connu. Dans les années 50, il avait vu arriver dans l'hôtel un monsieur coiffé d'un chapeau. Il l'avait reconnu et invité à prendre un verre. Mais Choltitz s'était esquivé. Croyez-vous qu'un homme qui aurait sauvé Paris aurait agi ainsi ?"
"Diplomatie", en salles le 5 mars.
" Diplomatie "
Au-delà de l'exactitude historique, " Diplomatie " est d'une indéniable efficacité dramaturgique : deux hommes se regardent dans le blanc des yeux, tenant le sort d'une ville, et quelle ville, entre leurs mains, l'un retournant progressivement l'autre. Reprenant leurs rôles de la pièce de théâtre signée Cyril Gely, les deux acteurs font assaut de talent. Le matois Dussollier s'enroule autour du roc Arestrup, qui se fissure. L'argumentation contre la discipline. Avantage à l'acteur Arestrup, Schlöndorff, après Gely, tirant le meilleur parti de cette confrontation.
Le Point- Publié le 05/03/2014
Sem comentários:
Enviar um comentário